[Parchemins inconnus]

Amakna
20 Descendre 640.

Monsieur K.,

Le froid a déjà fait son apparition, de même que la neige et la pluie, qu'on ne sait pas véritablement différencier. Djaul et son mécontentement se font en effet sentir.
Étant une disciple de Sadida, et aimant par dessus tout la nature, cette période de l'année m'attriste, voire me désespère. Les arbres sans feuilles, les fleurs flétries par le gel, la froideur permanente du monde extérieur... Comment aimer cette saison qu'est l'hiver ? Comment apprécier ce monde mort ? Chaque année, je me pose la question, mais celle-ci plus que les autres encore. Peut-être est-ce parce que je suis seule. Peut-être est-ce de ma faute, en fait.
Pendant que j'écris ces lignes, je suis à la taverne d'Amakna. Ici, il fait chaud, et la bière coule à flots. Je bois beaucoup ces derniers temps, pour oublier, pour ne plus penser; Pandawa doit sûrement s'intéresser à moi ! Je plaisante, évidemment. Cependant, aujourd'hui, nous sommes le 20 et Nowel approche, alors je n'ai pas bu, et je ne boirai pas jusqu'au 25, en votre honneur. Je sais à quel point vous teniez à cette fête. Embrassez votre femme et vos enfants de ma part.

Rassurez également mes parents s'il vous plaît. Dites leur que tout va bien, et que je me plais beaucoup ici.

Au revoir.
R.

Bonta
7 Juinssidor 614.

Aujourd'hui, il fait beau & chaud. Ça fait du bien. La clarté du soleil fait briller mes cheveux blonds, il y a même quelques reflets blancs dedans. Je suis donc allé me promener au sud de la cité, dans les champs de Cania, où j'y ai rencontré un jeune homme vêtu d'une cape noire; à ses pieds se trouvait un chapeau que je n'avais jamais vu. Il était allongé au sol, recroquevillé sur lui-même, et semblait blessé. J'ai tout d'abord pensé à faire comme si je ne l'avais pas vu, et à continuer ma route, ou bien même à faire demi tour. Mais dans un élan de bonté, je me suis dirigée vers lui et me suis accroupie afin de savoir quel était le problème.

« Eh m'sieur ! Ça va ? » lui ai-je dis.

D'un geste brusque, il se tourna vers moi et se remit sur ses jambes, comme si de rien n'était. Je pus voir qu'il s'agissait d'un disciple de Xélor, avant qu'il ne se précipite pour prendre son chapeau qu'il mit dos à moi. C'est à cet instant qu'il se retourna, et me fixa droit dans les yeux. C'est à cet instant que j'ai vu ses yeux d'un rouge flamboyant, et je compris, trop tard, qu'il s'agissait d'un membre de la Cité adverse: Brâkmar.
Ses yeux: Ce fut la dernière chose que je vis avant de me retrouver enfermée dans ce que je pense être les geôles de la Cité Rouge. De la lave entoure les cellules, il y fait une chaleur atroce. J'écris pendant que le garde n'est pas là, mais.. Je ne sais pas comment sortir d'ici, et je ne sais pas non plus ce qu'on me veut... Oui, j'ai peur.

14 Juinssidor 614.

Le gardien m'a enlevé mes trois derniers parchemins... J'espère que celui-ci, il ne l'aura pas.
J'ai donc revu le disciple de Xélor qui m'a enlevé il y a de ça quelques jours. Enfin, je pense. J'ai perdu la notion du temps ici. Je suis sortie hier de ma cellule, pour me diriger dans une salle très spacieuse, mais très glauque également. Plusieurs personnes s'y trouvaient, et tous avaient cet étrange chapeau qui ne laissait apparaître que leurs yeux flamboyants.
L'un deux, probablement leur Maître, leur Supérieur tout du moins, prit la parole. Il m'expliqua tout d'abord que j'étais retenue contre ma volonté pour une raison précise, puis me proposa, pour commencer, un repas. Poissons, viandes de toutes sortes, des légumes, bananagrumes, fraises... Un repas de roi pour une prisonnière ! Pendant ma dégustation, il reprit:

« Nous te voulons en vie. Tu es la fille d'un homme très important pour Bonta, n'est-ce pas ? Oui, c'est bien cela. Nous avons besoin d'armes. Et lui a besoin de sa fille. Nous avons donc chacun l'un & l'autre quelque chose que nous voulons, donc... Nous allons procéder à un échange, vois-tu ? »

C'est alors qu'il s'avança vers moi, une paire de ciseaux dans sa main gauche, et que deux de ses sbires me prirent les bras, afin que je ne bouge pas. Morte de peur, je ne savais pas ce qu'il allait me faire. Allait-il me torturer ? Avec des ciseaux, cela aurait été étrange... Alors quoi ? Il m'a, en fait, simplement coupé une mèche de cheveux pour l'envoyer à mon père, en témoignage de ma retenue. Il griffonna ensuite quelques mots sur un parchemin, sûrement pour avertir mon père... Par la fenêtre, on pouvait apercevoir presque toute la cité de Brâkmar. C'était sûr désormais, j'étais emprisonnée dans la Tour...